Nous voici devant l’une des plus belles voitures de la collection du Musée des 24 Heures du Mans : la Porsche 917. Son dessin agressif lui donne une allure remarquable. Il existe deux types de Porsche 917 : la LH (Lang Heck) pour Longue Queue puis la K (Kurz) pour version courte. Celle qui trône au musée est une version LH. Cette voiture connait une carrière courte en compétition puisqu’elle a seulement disputé les 24 Heures du Mans 1971. Elle était engagée par l’écurie Gulf de John Wyer. À cette époque, elle était habillée aux mythiques couleurs bleu et orange de la compagnie pétrolière Gulf. Mais tout d’abord, un peu d’histoire !

Au milieu des années 60, Porsche est un constructeur dont la réussite repose sur un élément majeur : une présence continue en compétition. C’est pendant cette période que la marque allemande va prendre du galon et entrer dans la légende. Après le grand duel Ferrari Ford, dont le point culminant est 1967 au Mans, les instances internationales, effrayées par les performances des voitures, vont changer considérablement le règlement technique du championnat du monde en limitant la cylindrée à 5 Litres. Porsche va créer dans un premier temps le modèle 908, un prototype de 3 Litres équipé de 8 cylindres à plat refroidi par air, mais la conquête du titre fut plus difficile que prévu (au Mans comme ailleurs) face à la Ford GT40 bleue et orange de l’écurie de John Wyer. Pour l’année 1969, la FIA décide de limiter la quantité d’homologation dans la catégorie sport à 25 exemplaires. Porsche va en profiter pour se doter d’une nouvelle arme, une voiture dotée d’un moteur 12 cylindres 5 Litres. C’est le point de départ de la Porsche 917, mais le temps manquait pour assembler les 25 exemplaires nécessaires pour la présentation à la Commission Sportive Internationale (CSI) en vue de son homologation. Porsche a donc demandé à tous ses employés, y compris les comptables et les secrétaires, d’aider à son assemblage.

390 km/h dans la Ligne droite des Hunaudières

Le profilage du « Monstre » est particulièrement soigné, mais les pilotes de l’usine vont se plaindre du comportement de la voiture à très haute vitesse. Légèreté et aérodynamisme sont les caractéristiques essentielles pour Ferdinand Piëch son concepteur, mais la tenue de route est précaire, ce qui est ennuyeux pour une voiture conçue pour laisser sur place la concurrence dans la célèbre ligne droite des Hunaudières. Alors Ferry Porsche va confier l’exploitation du service « compétition » à l’écurie Wyer-Gulf, au grand désarroi de Piëch. Par une préparation soigneuse, l’anglais, aidé par son fidèle second l’ingénieur John Horsman, va participer activement au développement technique de la voiture, apportant de sérieuses améliorations à la carrosserie. De ce fait, la voiture fonctionne bien et les chronos tombent. Ferdinand Piëch, décide d’en faire de même pour les voitures d’usine. Porsche va remporter sa première victoire au Mans en 1970. Les mauvaises conditions climatiques de ce millésime, donne l’avantage à la 917 K sur la LH. La « K » de Herrmann et Attwood remporte la course en totalisant 4607.810 km, offrant une belle victoire à Ferry Porsche avec trois Porsche aux trois premières places. La deuxième place revient à l’équipage Larrousse et Kaushen sur la 917 LH.

Pour 1971, l’aérodynamique est encore améliorée ainsi que la vitesse et la tenue de route. Le pilote approche ainsi les 390 km/h dans la ligne droite des Hunaudières. Aux essais préliminaires, le pilote Jackie Oliver sur une LH réalise un chrono de 3’13’6, franchissant ainsi le premier la barre des 250 km/h de moyenne sur un tour, encore aujourd’hui l’un des tours le plus rapide de l’histoire des 24 Heures du Mans. Malgré ces records les trois « Longue Queue » doivent abandonner, laissant la victoire à la Porsche 917 K de Marko et Van Lennep, moins rapide en vitesse de pointe mais toutefois plus maniable dans les virages et sous la pluie. Dans son film « Le Mans », l’acteur Steve McQueen met en scène une dernière victoire (non officielle) d’une Porsche 917 bleu et orange devenue aujourd’hui légendaire.

Des exhibitions à Chantilly et Goodwood

Magnifiquement bien entretenue par l’Automobile Club de l’Ouest, aujourd’hui, la 917 du Musée s’éclipse souvent pour participer à de nombreuses manifestations historiques de premier plan. On a pu la voir évoluer aux Classics Days 2018, sur la piste du circuit de Nevers Magny-Cours, pilotée par le français Romain Dumas, ou encore, l’admirer au Concours d’Elégance de Chantilly aux mains de Gérard Larrousse ou elle fut distinguée par le prix spécial du jury. Elle a également voyagé en Grande-Bretagne en 2019 pour le Festival of Speed de Goodwood, l’une des plus populaires manifestations de voitures de compétition historiques au monde. Elle était pilotée par un autre ancien vainqueur de la célèbre course sarthoise : le Britannique Derek Bell (cinq victoires aux 24 Heures du Mans). Mais rassurons les amateurs de cette voiture emblématique, le reste du temps, cette authentique Porsche 917 est bien visible dans l’espace Porsche du musée des 24 Heures du Mans.

Grâce au Musée des 24 Heures du Mans et ses 140 véhicules, l’Automobile Club de l’Ouest vous raconte l’épopée de l’automobile dans la Sarthe et le succès de son épreuve internationale. Bentley, Ferrari, Jaguar, Ford, Porsche, Matra, Audi, Peugeot, Toyota … tous les grands noms y sont représentés par leurs modèles mythiques qui immergent le visiteur dans la plus grande course d’endurance au monde. 350m² d’expositions temporaires viennent compléter ce parcours thématisé qui peut se poursuivre par la visite du célèbre circuit des 24 Heures du Mans.