La grande rotonde centrale du Musée des 24 heures du Mans abrite la collection des 4300 voitures ayant pris part à la célèbre épreuve, à l’échelle 1/43 ème. De quoi ravir petits et grands. Les voitures sont soigneusement présentées, telle une mise en épis des célèbres départs type Le Mans entre 1925 et 1969. Classées dans l’ordre d’arrivée (15 classées seulement) ou d’abandon, avec même le podium des lauréates, les 54 miniatures sont d’une fidélité de reproduction exigeante. Un groupe de passionnés bénévoles veille à leur authenticité avec beaucoup de soin, scrutant les photos d’époque, reprenant les détails avec une minutie chirurgicale, recollant le moindre accessoire défaillant, reprenant une teinte jugée approximative. Ces grands enfants à la compétence historique indiscutable rêvent à travers ces jouets élevés au rang de témoins de leur histoire.

Les 24 Heures du Mans en septembre

La météo calamiteuse du printemps 1923 transforma complètement la grande fête qu’aurait dû être la première édition des 24 Heures qui se déroula les 26 et 27 mai. Les organisateurs décidèrent de reculer à la mi-juin les futures épreuves, se rapprochant ainsi de la nuit la plus courte (solstice d’été) et du 24ème week-end de l’année. Et depuis les 24 heures se déroulent à la mi-juin. Néanmoins, de 1940 à 1948 inclus, durant la seconde guerre mondiale, il n’y eu point de 24 Heures. De même en 1936 pour cause de troubles sociaux. Certes, une date de repli avait été trouvée mais la fédération britannique refusa de déplacer une épreuve nationale et tant de pilotes britanniques étaient prévus aux 24 Heures que la superposition des deux manifestations était impossible. Une autre piste était aussi étudiée mais l’ACO ayant promis son concours à l’organisation du premier Grand Prix de Deauville, les sarthois, en vrais gentlemen, renoncèrent. Une autre dérogation à la tradition eut lieu en 1968 où là encore les désordres sociaux du printemps (mai 1968) contraignirent à reporter à l’automne, l’édition 1968, des 24 Heures du Mans, les 28 et 29 septembre précisément. Les grandes marées d’équinoxe, proches, eurent pour effet de copieusement arroser le circuit, rendant l’épreuve encore plus sélective (sept accidents) et difficile pour les pilotes (quatre heures de nuit supplémentaires sous la pluie).

Henri Pescarolo la révélation

Néanmoins ce fût une course fantastique d’où émergea l’immense talent d’Henri Pescarolo, surnageant dans des conditions dantesques, au volant d’une Matra 630 à moteur V12, bien née, mais privée d’essuie-glace, rendant le pilotage très instinctif. La foule ne s’y trompa point et l’idée de voir une voiture « bleu de France », l’emporter, tint en haleine le public pendant plusieurs heures. Hélas, il n’y eut pas de miracle et accablée par le sort, la Matra, pointée en deuxième position à cinq heures de l’arrivée, dut renoncer après être passée sur les débris de l’Alpine Renault accidentée de Mauro Bianchi, au freinage des « esses » du Tertre Rouge. Finalement, ce furent Pédro Rodriguez et Lucien Bianchi qui l’emportèrent sur leur Ford GT 40 aux couleurs du pétrolier Gulf. Pédro Rodriguez avait disputé l’année précédente, ici même, sur le circuit Bugatti cette fois, le dernier Grand Prix de l’ACF de Formule 1 au volant de sa Cooper Maserati, quant à Lucien Bianchi, on peut imaginer son émotion lorsqu’arrivant sur le lieu de l’accident, il découvrit la voiture de son frère, complètement embrasée. Cette année 68 ce fût aussi l’inauguration de la chicane Ford en amont de la ligne droite des tribunes et des stands.

Parmi les 54 voitures originales au départ de cette édition 1968 des 24 Heures qui figurent dans la vitrine de la collection de miniatures, unique au monde, il faut noter les Howmet à turbine, gloutonnant 60 L de kérosène aux 100 kilomètres soit une heure d’autonomie au Mans, la Ferrari n°14, victorieuse en 1965 et toujours vaillante. La déroute des nouvelles Alpine A220, trois litres fut largement compensée par les victoires aux deux indices par les Alpine A210. Il y eut aussi un très beau tir groupé (4è, 5è, 6ème) des Alfa-Roméo type 33, et que dire de l’étonnante Moynet XS à la coque en bois moulé. Une Deep Sanderson à moteur de mini, une Healey 3 litres, figurent dans cette vitrine, en compagnie d’une Fiat Dino du futur Directeur de course Marcel Martin, le manceau, et d’une rare Chevron B12 V8 de John Woolf qui se tuera dans le premier tour des 24 Heures un an plus tard.

L’édition 2020 des 24 Heures du Mans s’annonce déjà comme inédite. Décalée aux 19 et 20 septembre en raison de la pandémie de Coronavirus COVID-19, cette 88e édition verra s’affronter 62 voitures en piste tandis que le programme sera exceptionnellement compacté sur quatre jours pour une compétition toujours aussi intense.